Jean-Luc Gaidon, la diversité fait sa force
À la tête de Winelia, société de conseil et de formation à cheval entre Grenoble et Bagnols-sur-Cèze,
cet entrepreneur cultive l’engagement au quotidien.
Jean-Luc Gaidon aime bien les CV particuliers, ceux qui ne sont pas aussi linéaires que le veut la norme. Chef d’entreprise engagé dans différentes associations, le patron de Winelia, un cabinet de conseil et de formation notamment installé à Bagnols-sur-Cèze, croit fermement en «la force de la rencontre.»
Une gageure selon lui car «dans l’entreprise, on a excessivement formaté les choses. En esquivant le risque, on perd le sel de l’imprévu. Or, ce qui est intéressant dans le recrutement, c’est d’avoir face à soi des profils atypiques. Je m’élève contre le discours qui dit qu’il n’y a pas de candidats ! J’affirme qu’à force de formatage, on ne sait plus les voir», développe-t-il.
L’engagement, Jean-Luc Gaidon le définit comme « une posture du dirigeant. C’est simplement le regard qu’on porte sur l’autre », répète-t-il en insistant : «Ce n’est pas une question de diplôme ! Ni de sexe ou de couleur de peau.»
A la tête d'une société comptant une demi-douzaine de salariés, le dirigeant prend conscience du problème des discriminations à la fin des années 1990 lorsque, à Grenoble, une initiative du groupe d’entrepreneurs auquel il appartient jette une lumière crue sur la situation. «On a alors décidé de s’autotester, et d’envoyer des faux CV, dans nos entreprises respectives. Or, ces CV pourtant de qualité n’arrivaient jamais sur nos bureaux. Il y avait vraiment un problème», rejoue-t-il.

À partir de là, le groupe monte des formations sur le contournement des discriminations raciales, ouvre les entreprises aux personnes issues de la diversité et lance des entretiens inversés, où ce sont les candidats qui choisissent leur recruteur. La machine est lancée, l'expérimentation est devenue pérenne. Le parcours de Jean-Luc Gaidon est ainsi jalonné de grandes dates comme la signature de la première charte de la diversité en 2004 ; un 1er Prix de la Diversité en 2006 ex-aequo avec le groupe automobile PSA (aujourd’hui Stellantis). En 2009, son entreprise est même la première à décrocher le Label Diversité. Son engagement lui vaut d’être reçu par deux présidents de la République, Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy.

«La prise en compte de la diversité a été mon expérience de vie. Elle m’a rendu plus fort dans ma relation client, dans mon entreprise et dans ma vie privée», affirme-t-il. Cet engagement nourrit pour lui tous les autres. Longtemps membre du Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) à Grenoble, Jean-Luc Gaidon s’implique dans la société civile, dans les associations d’entrepreneurs du Gard rhodanien et à la Mission Locale Jeune du cru. Un territoire gardois où il est en train de rapatrier toutes ses activités, et vis-à-vis duquel il dit avoir, à son échelle, la même attitude que son ami Mohed Altrad* avec Montpellier : «Ce territoire m’a donné ma chance, je me dois de la restituer.»
L’objectif du dirigeant est désormais de transmettre cette fibre. A 60 ans, Jean-Luc Gaidon a recruté Alexis Sambugaro, 32 ans, pour lui succéder. Son profil ? Celui d’un diplômé en Génie des Matériaux puis en Ingénierie d’Affaires que le patron de Winelia a rencontré dans un restaurant où le plus jeune assurait le service ! «A son poste, Alexis était invisible, comme pas mal de gens. Mais il avait un CV fait pour moi, et en matière de valeurs et de façon de travailler, on pouvait avancer ensemble», raconte Jean-Luc Gaidon, avant d’estimer que «ne pas attendre d’arriver à la fin pour se poser la question de la transmission» est aussi une forme d’engagement.